Nuit photo du 13 au 14 août 2017

Au programme : Saturne, NGC6543, Uranus, la Lune

Saturne

Quelques films bruts de Saturne pour commencer, qui s'avèrent assez décevants. Elle est seulement 20° au-dessus de l'horizon, donc la turbulence rend difficile l'exploitation d'une telle puissance. Il n'est pas impossible que la mise au point ait bougé, mais les images ne font pas clairement apparaître un problème de mise au point, donc il semble bien que ce soit la turbulence qui explique ce mauvais résultat.

Cette photo a été prise avec une barlow 2x apochromatique (probablement x2,3 ou x2,4 avec le tirage) et ma DFK21AU618.AS dont les pixels font 5,6 microns. Avec cette configuration, Mars l'été prochain apparaîtra environ 30% plus grosse que Saturne (hors-anneaux) sur cette photo. Mais elle sera également assez basse, et il faudra beaucoup de patience et de chance pour sortir la photo de l'été 2018.

Saturne

Comparaison C8 ici :
Planche de mes meilleures photos planétaires
Le C8 l'emporte pour la première fois, grâce à une Saturne plus haute, moins de turbulence, et une plus grande sélection.

NGC 6543, la nébuleuse planétaire de l'oeil de chat

Cette fois c'est ma vieille CDD, la SXV-M7C qui opère au foyer sans barlow ni réducteur.

Le temps de pose unitaire est de seulement 10 secondes, car l'objet est très lumineux, sans zone particulièrement sombre à faire remonter. Et il ne faut pas non plus cramer la neine blanche qui est au milieu, ce qui fut déjà presque le cas avec ce temps de pose court pour l'exercice.

Je conserve 103 poses sur 148, soit près de 70%, contre 50% sur les dernières nébuleuses planétaires. La comparaison n'est toutefois pas très significative, dans la mesure où le travail est facilité par le temps de pose plus court (10 secondes au lieu de 18), mais qu'en même temps il faut être plus strict sur cet objet. On peut quand même considérer que 70% est un taux de conservation très satisfaisant au regard du temps de pose et de l'exigence du tri.

Le résultat après traitement est à la hauteur de ce qu'on peut attendre de l'instrument, voire un peu mieux :

NGC6543

L'échantillonnage est d'environ 0,5 seconde par pixel pour l'image en 100%.

La comparaison avec le C8 est sans appel :

NGC6543

Ceci fait, il reste principalement 2 nébuleuses planétaires à tenter : NGC6818 et NGC7009, la nébuleuse de Saturne, qui risque de souffrir davantage de la pollution lumineuse de Royan, au risque d'en perdre les oreilles auxquelles elle doit son nom. Eventuellement un jour NGC6210 mais sans garantie de succès.

Uranus

Le seul film brut est inexploitable, la mise au point ayant bougé lors du GoTo entre l'étoile de mise au point et Uranus.
A ce niveau (focale réelle dans les 8 ou 9 mètres avec des pixels minuscules de 3,75 microns) la mise au point est délicate même avec un masque de Bahtinov, et il faut utiliser la vis de lock-unlock à chaque fois, ce à quoi je ne m'attendais pas, n'étant pas confronté au problème avec mon C8 EdgeHD. Apparemment Etienne avec son C8 XLT rencontre le même type de contrainte.
Le masque de Bahtinov et la configuration photo la plus extrême rendent perceptibles des imperfections mécaniques totalement imperceptibles en visuel.

Une fois le lièvre soulévé, je décide de ne pas recommencer Uranus, mais d'utiliser le lock quand la mise au point aura été faite avec la configuration lunaire, avant de revenir sur la Lune.

La Lune

La configuration d'abord :
- barlow 2x Antares apochromatique
- filtre IR-cut
- filtre coloré rouge (vieux filtre de récupération destiné au visuel)
- caméra ASI 120 MM (caméra CMOS monochrome de 1,2 million de pixels de 3,75 microns de côté, idéale pour la Lune)
L'empilement de 2 filtres empêche la caméra de rentrer complètement dans la barlow, ce qui augmente un peu le tirage, donc potentiellement le grossissement photo.

Après avoir fait la mise au point sur une étoile, je tourne la vis lock avant de retourner sur la Lune.

Même si la Lune en fin de nuit est nettement plus haute que Saturne en soirée, la turbulence est tout de même bien présente. Mais comme la Lune est beaucoup plus près de Soleil que Saturne, et qu'elle ne tourne pas en quelques minutes comme une planète, je suis mieux armé pour combattre cette turbulence. Le filtre rouge d'abord, et des films bruts de 10 minutes (soit près de 11000 photos chacun) et une sélection des meilleures 8% seulement sous Autostakkert 2. Cette fois la turbulence doit faire face à un adversaire à sa taille !

Suite des traitements sous Iris et Paint.net
Je mets des liens pour éviter que la taille des photos n'explose la mise en page de toute la page :

Le cratère Clavius (il faudra dire aux luniens de construire des cratères qui rentrent dans la caméra, mais en même temps comme c'est le plus grand de la face visible de la Lune, je cherche les ennuis.)

Le cratère Copernic (attention les marches sont usées.)

Le cratère Ptolémée (qui paraissait pourtant tellement plat dans un petit télescope)

Le cratère Walther (reconnaissable à sa triplette de cratères)

Le cratère Arzachel (singulier avec le petit cratère, et la faille qui passe dessous)

Le cratère Albategnius (finalement assez banal)

Un réseau de failles (la trop grande proximité du terminateur rend la prise de vue délicate)

Le profil des montagnes sur la face éclairée (la rotondité à peine perceptible de la Lune donne une idée du grossissement)

Avant que le jour ne soit vraiment levé, je repointe une étoile et remets le masque de Bahtinov. La mise au point cette fois avec le lock a plutôt bien tenu. Le masque de Bahtinov permet de visualiser toutefois clairement un léger décalage, mais il est assez limité pour venir d'une variation de température après plus de 1h30 de travail sur la Lune. En effet, le tube étant en métal il se rétracte avec le froid beaucoup plus que les optiques qui sont en pyrex, ce qui induit une variation de mise au point qui peut devenir perceptible avec un seuil de détection aussi fin. C'est pourquoi les astrographes haut de gamme sont souvent proposés en tube carbone.

Les résultats s'avèrent ici encore à la hauteur de ce qu'on peut attendre d'un tel instrument.

En faisant une moyenne à partir de la taille des différents cratères, on trouve que 1 pixel représente entre 180 et 185 mètres à la surface de la Lune, la Lune étant ce jour-là à une distance un peu plus favorable (369.500 km) que la distance moyenne.
Cette valeur approximative correspondrait exactement à un échantillonnage de 0,1024 seconde par pixel.
Ce qui placerait la focale réelle (avec barlow + tirage) à 7750mm, la barlow ayant eu pour effet x2,183.
Mais tout ceci part de la moyenne d'une série de mesure avec une étendue assez large, donc ça reste des estimations.

Une autre méthode de calcul donne entre 0,094 et 0,102 seconde par pixel.

Pour se faire une idée de ce que cela représente, on peut dire que 0,1 seconde d'angle représente la taille d'un ballon de football situé à 46km de distance.